Cyclo Nord-Sud a initié la Vélorution Saint-Michel dans le quartier de Montréal du même nom. Le but est de sensibiliser et outiller la population du quartier à l’utilisation quotidienne du vélo. On y propose des initiations au vélo et à sa pratique, des formations en mécanique vélo, des sorties sur route, et de nombreuses autres activités comme :
des ateliers mobiles de réparation de vélos dans les parcs,
un concours photo «Montre ton vélo»,
des prêts de vélos et la vente de vélos à prix modiques.
Présentation du projet Vélorution Saint-Michel, 0:24 – 1:00
Quand on pense auxnombreux avantagesque présente la bicyclette, on réalise qu’on a beaucoup à gagner en remettant en question le modèle de développement actuellement mis de l’avant avec ses conséquences sur notre mode de vie.1
On dit que la nécessité peut mener à la créativité. Que pouvons-nous apprendre des multiples utilisations qu’on fait de la bicyclette? Loisir, transport, force de traction, etc. Un coup d’œil sur ce qui se passe dans plusieurs pays en voie de développement nous fait réaliser qu’on y retrouve une utilisation beaucoup plus optimale des vélos : poids transporté plus important, moyen de transport principal, plus grand nombre d’utilisateur(rice)s par bicyclette, etc.
Les exemples ne manquent pas pour s’inspirer d’autres façons de faire. Que ce soit à Cuba où les résidents ont dû trouver des alternatives de transport à cause d’un approvisionnement en pétrole qui diminuait, en Afrique du Sud où des travailleur(euse)s qui ne peuvent payer le transport par autobus tous les jours pour se rendre au travail ont recours au vélo, à Bogotà, capitale de la cyclovia au Guatemala où se trouve l’organismeMaya Pedal. On peut regarder, en particulier, le modèle de Caracol en Haïti où l’on met en place une véritable vélo-cité.
Caracol, la vélo-cité du Cap-Haïtien
Caracol est une petite ville de 15 000 habitants située dans le Nord-Est d’Haïti, à environ 300 kilomètres de la capitale Port-au-Prince. Cette ville côtière et touristique affiche une pauvreté extrême comme c’est le cas pour la majorité des communautés éloignées, rurales et marginalisées en Haïti.
Avec l’envoi de plus de 7 300 vélos en onze ans dans la région Nord d’Haïti, Cyclo Nord-Sud etson partenaire CENTRECHont mis en place tous les éléments favorisant le développement de micro-entreprises d’économie sociale et solidaire ayant comme moteur économique la bicyclette.
Ainsi, il est dorénavant possible de voir sur les routes de la ville de Caracol des jeunes transportant de l’eau aux personnes âgées grâce à leurs triporteurs, et qui se rendent à l’école en trois fois moins de temps qu’auparavant… Des infirmières du centre de santé, où travailleMarie-Flore Bélizaire, disposent maintenant d’un certain nombre de bicyclettes pour le personnel infirmier, ce qui leur permet de visiter plus de personnes nécessitant des soins de santé.
En visionnant la vidéo d’une vingtaine de minutes deSaga Citéqui présente divers enjeux auxquels font face les collectivités des villes avec des changements climatiques, on réalise que la vélo-cité de Caracol est peut-être une source d’inspiration qui pourrait faire du chemin jusque chez nous.
Une discussion plus détaillée sur la solidarité internationale se retrouve aumodule 3 de cette trousse.
1- Favoriser le covoiturage pour se rendre au travail ou à l’école.
Il existe plusieurs systèmes de gestions internes favorisant le covoiturage au sein des entreprises (logiciels ou babillards, etc.). Demandez à votre école ou à votre employeur d’implanter un tel système pour vous permettre de transformer votre auto solo en un véhicule de transport en commun très efficace et bon autant pour l’environnement que pour votre porte-monnaie!L’Association des Centres de gestion des déplacements du Québec(ACGD) peut aussi vous donner un coup de main. Les établissements et les entreprises ont tout à y gagner, car le covoiturage favorise l’esprit d’équipe et permet de diminuer la quantité d’espaces de stationnement, donc aussi les coûts qui y sont rattachés en espace et en entretien.
Rouler à vélo c’est plaisant. Rouler à deux, c’est mieux! Entre amis, en famille, à plusieurs, c’est motivant. Pourquoi ne pas adapter le concept du covoiturage au vélo? Rejoignez-vous afin de réaliser votre déplacement en groupe. Partagez vos trucs et astuces. Donnez-vous des défis du type « Nous irons ensemble à l’école ou au travail tant de jours par semaine » afin d’inclure l’usage de la bicyclette dans vos habitudes quotidiennes!
Il est aussi possible de pratiquer le covoiturage lors de vos déplacements interurbains. Plusieurs compagnies existent selon votre région. Inscrivez-vous en tant que conducteur ou passager. Vous économiserez de l’argent, aurez de la compagnie durant le voyage et, en plus, c’est 100 % sécuritaire puisque les membres sont sélectionnés!
2- Inciter ses camarades de classes ou collègues de travail à marcher ou à utiliser leur vélo.
59 % des Canadiens parcourent moins de 10 kilomètres pour se rendre au bureau et 36 % font 5 km ou moins. À vélo, réaliser cette distance prend moins de 30 minutes. Joignez l’utile à l’agréable en combinant exercice, déplacement écologique et loisir1! Peu importe l’âge, pourquoi ne pas organiser unTrottibus?Il suffit de se rendre chez l’un et chez l’autre jusqu’à ce que tout un groupe se joigne à ce petit «bus» de marcheur pour se rendre jusqu’à l’école ou au travail.
Le vélo est un mode de transport efficace et utile, et ce à longueur d’année. Par cette action, nous prouvons qu’il est possible de réaliser de longues distances l’hiver, mais pour apprivoiser sa bicyclette, pas besoin d’être aussi extrême! Habituez-vous peu à peu. Au début, commencez par de petites distances les plus belles journées d’été. Vous aurez du plaisir, vous vous motiverez et, bien vite, gageons que vous aurez envie de vous munir d’équipement vous permettant d’allonger votre saison de vélo. Qui sait, peut-être aurez-vous la piqûre et voudrez-vous même poursuivre l’expérience jusqu’à rouler à vélo l’hiver?
On croit souvent, à tort, qu’il faut une auto pour séduire. Ne prenez pas le risque d’acquérir un modèle d’auto pas assez « séduisant ». À vélo, vous épaterez la galerie à coup sûr! Les gens trouvent les cyclistes courageux et les admirent! En tant que cyclistes, nous roulons autant par plaisir que par besoin de nous déplacer!
3- Ne pas laisser le moteur d’une voiture tourner au ralenti plus de 30 secondes, même en hiver.
Lorsque les parents déposent les enfants à l’école, que l’on attende quelqu’un devant un commerce ou une résidence, on a souvent tendance à laisser tourner le moteur au ralenti. Il suffit de 10 secondes de marche au ralenti pour consommer plus d’essence. En coupant le contact, il est possible de réduire les émissions de gaz à effet de serre et d’économiser jusqu’à 100 $ par année en carburant!
En hiver, à peine 30 secondes suffisent pour réchauffer le moteur de votre voiture. C’est l’auto qu’il faut réchauffer, pas la planète!
4- Favoriser les transports collectifs tels que l’autobus, le train ou le métro en toutes circonstances.
Opter pour les transports collectifs offre des avantages évidents pour l’environnement. À titre d’exemple, un autobus émet jusqu’à 690 fois moins de pollution par passager qu’une auto. Vous n’habitez pas dans une des zones de population denses du Québec? Rassurez-vous, plusieurs systèmes de transports collectifs existent et certains sont déjà en fonction ou peuvent l’être chez vous. Que ce soit des taxis-bus, des taxis collectifs ou encore un système d’autobus de type scolaire offert par votre école ou même votre employeur, il y en a pour tous les goûts2.
5- Favoriser les systèmes d’autopartage dans les centres urbains.
Avoir accès à une auto est sans contredit un bel avantage. Mais saviez-vous qu’une voiture passe 95 % de son temps stationnée3? Par ailleurs, pour en posséder une, vous paierez en moyenne autour de 25 % de votre revenu, ce qui veut dire que vous travaillerez une semaine par mois juste pour votre « char »! L’autopartage permet de diviser les coûts entre plusieurs individus. En plus, vous ne payez que lorsque vous utilisez l’auto, ce qui est nettement économique. De plus en plus de centres urbains ont leur service d’autopartage. Lorsqu’il y a demande, l’offre suit. Informez-vous et demandez votre service d’autopartage. Pourquoi n’auriez-vous pas vous aussi accès à cet avantage? Sinon, vous pouvez toujours offrir à votre voisinage de partager une voiture à plusieurs!
6- Inciter les municipalités à piétonniser les centres urbains.
Moins d’autos signifie plus de piétons. Partout sur la planète, les endroits qui ont été piétonnisés se sont revitalisés, entraînant une vie de quartier meilleure et un développement économique accru. Il est prouvé que les piétons et les cyclistes dépensent plus dans les commerces et reviennent plus souvent4.On créé ainsi des milieux de vie plus prospères, sécuritaires et conviviaux!
7- Respecter la vitesse maximum de 100km/h sur l’autoroute afin de diminuer la consommation du véhicule et de réduire jusqu’à 20 % les émissions polluantes.
En roulant plus lentement, vous réduirez aussi l’usure de vos pneus et augmenterez la sécurité sur les routes.
8- Planifier les emplettes pour réduire ses déplacements.
Vous voulez donner un coup de pouce à l’environnement en plus de ménager temps et argent? Planifier vos emplettes est une solution gagnante! Au moment de faire vos courses, plutôt que de parcourir une grande distance à voiture dans le but d’économiser quelques dollars dans les grandes surfaces commerciales, prenez plaisir à découvrir les commerçants de votre quartier accessibles à pied ou à vélo et donc plus économiques sur le plan du transport. Vous y gagnerez sur plusieurs autres plans : vous ferez un peu d’exercice, ferez connaissance avec les gens de votre quartier et économiserez même quelques précieuses minutes!
9- Privilégier les sports actifs, plutôt que les sports motorisés.
La Route Verte est l’un des plus grands circuits de cyclotourisme au monde et permet de se déplacer dans presque toutes les régions du Québec. À vélo, profitez des paysages à couper le souffle que le Québec vous offre!
10- Demander à la direction de son école ou à son employeur d’implanter des aménagements encourageant l’usage du vélo : stationnement sécuritaire, accès à des douches, etc.
Les bienfaits du cyclisme sur la santé physique et mentale ne sont plus à démontrer et présentent même des avantages non négligeables pour les employeurs. En effet, on constate chez ceux qui utilisent le vélo pour se rendre à l’école ou au travail une diminution de plus de 40 % du taux d’absentéisme, des deux tiers des accidents de travail et de 15 % du taux de roulement annuel de la main-d’œuvre, ainsi qu’une augmentation du rendement de 15 % à 200 %.
La transformation sociale, un travail de longue haleine Devenez le changement que vous voulez voir. – Gandhi
Souvent avec humour et à grands coups d’éclats, les cyclodrames, les «pellete-in» et les die-in ont marqué la trajectoire inspirante du militantisme cycliste. Le militantisme cycliste a connu une trajectoire intéressante et inspirante. Grâce à des événements créatifs et à des gestes qui peuvent avoir l’air bien anodins aujourd’hui, mais qui étaient interdits dans un passé pas si lointain, ils ont, par exemple, obtenu l’accès pour les cyclistes à un pont. En entrevue, Claire Morissette relatait même qu’elle dut aller jusqu’à être emprisonnée pour avoir pris le métro avec sa bicyclette au début des années 1980, un geste volontaire qui visait à dénoncer l’interdiction des vélos dans les wagons de métro à l’époque.
Le vélo est devenu à la fois un moyen de manifester et une raison pour se mobiliser. Qu’on pense àTessie Reynoldsqui s’est battue dans l’Angleterre victorienne pour que les femmes aient le droit de pédaler ou, plus récemment, à la PalestinienneAsmaa Al-Ghoulqui a traversé une partie de la Palestine pour défier les interdits qu’on y inflige aux femmes, faire tomber les tabous et enrayer les préjugés.
L’importance de se faire voir et de se faire entendre
Souvent invoqué pour des raisons de sécurité, l’importance de se faire voir à vélo va bien au-delà de s’assurer d’avoir des réflecteurs et de porter des vêtements voyants. Occuper l’espace public, être présents sur les pistes cyclables et dans les rues sont des rappels importants et quotidiens que la bicyclette est bien présente et utilisée par de plus en plus de gens. C’est d’ailleurs ce que met en scène une Masse critique.
En fait, un nombre accru de cyclistes inciterait les automobilistes à être plus attentifs à leur présence. C’est ce qu’indiquent des études réalisées sur ce phénomène. Par exemple, au Québec, même si le nombre de vélos a plus que doublé entre 1987 et 2010, le nombre de décès et de blessé(e)s a chuté de plus de la moitié1.
Depuis 2002, ENvironnement JEUnesse mobilise des centaines de cyclistes qui parcourent des centaines de kilomètres à vélo en plein hiver pour l’environnement grâce à l’Action citoyenne à vélo, devenue 2 roues 4 saisons. Voici quelques-unes de leurs propositions citoyennes qui sauront peut-être vous inspirer à passer à l’action :actions citoyennes à vélo.
Vélo Québec, L’état du vélo au Québec en 2010, Vélo Québec, 2011.
Il ne peut y avoir révolution que là où il y a conscience.
– Jean Jaurès
Quoi de mieux que de joindre la parole à l’action? Pourquoi ne pas prôner de profonds changements pour un usage accru du vélo et ainsi suivre la voie de la vélorution?
Vélorution : Jeu de mots avec « vélo » et « révolution », associé à un mouvement prônant une meilleure reconnaissance et une plus grande utilisation des vélos. C’est aussi une bataille contre le monopole des véhicules individuels motorisés. Une manière de s’ouvrir au monde tout en mettant de l’avant ses préoccupations environnementales et solidaires est de se renseigner un peu plus sur la vélorution qui souffle aux quatre coins du monde et sur les diverses manières d’y contribuer.
Le vélo au cœur d’un développement alternatif
Penser globalement, agir localement.
Il n’y a pas de consensus à savoir qui est la première personne à avoir prononcé le célèbre : « Penser globalement, agir localement ». Certains l’attribuent à un urbaniste écossais, d’autres à Jacques Ellul, un théologien et sociologue français, ou encore à des militants environnementalistes étatsuniens, etc. La diversité des gens à qui on attribue l’origine de la citation démontre bien que cette idée reflète des préoccupations liées à différents endroits et à différentes époques.
Les problèmes mondiaux, même si on n’en voit pas toujours les répercussions directes dans notre quotidien, suscitent bien des inquiétudes. Les changements climatiques, la dégradation de la biodiversité et les guerres nous font remettre en question nos modes de vie actuels et notre dépendance à la consommation effrénée, aux déplacements en voiture et aux énergies non renouvelables. (Voir notre module surla surconsommation et la réutilisation).
Des actions développées par des groupes comme Cyclo Nord-Sud, le Monde à Bicyclette,Vélo Québecet plusieurs groupes locaux commeVéloCentrixà Québec ou Sherbrooke-Vélorution inspirent à mettre le vélo au cœur de notre vie et d’en faire un outil de transformation sociale. Des groupes cyclistes se mobilisent aux quatre coins du monde, commeGDL en Biciau Mexique ouPro Velo en Belgique.
Kiosque de réparation vélo tenu parVélorution Saint-Micheldans le quartier de Saint-Michel à Montréal.
Dans la province du Cap-occidental, en Afrique du Sud, l’association Les femmes à bicyclette tente de changer les mentalités. À Khayelitsha, un township du Cap, une vingtaine de femmes viennent de suivre une formation axée sur la sécurité routière et l’entretien du vélo. Dans cette partie de la ville, les femmes se déplacent traditionnellement à pied ou à l’aide des transports publics bondés.
Le vélo est particulièrement adapté pour les femmes, car elles effectuent en général des trajets courts en dehors des heures de pointe et jonglent entre leur travail, les enfants et les responsabilités du ménage. De plus, la bicyclette les rend indépendantes des horaires des transports publics et offre davantage de flexibilité dans la gestion de leur temps.
« Une bicyclette est tout à fait ce qu’il me faut… À vélo, je peux faire ce que je veux de mon temps libre » affirme Juanita Maguni, qui utilise ce moyen de transport pour rejoindre son travail dans le faubourg de Manenberg. « Mais, même si c’est facile d’utiliser le vélo, c’est difficile d’ignorer les commentaires à propos d’une femme sur un vélo… je dois parfois réunir mon courage pour pédaler » dit-elle.
Femmes qui pédalent
À travers des portraits de femmes ayant vécu à différentes époques et à différents endroits dans le monde, découvrez ce que l’apparition de la bicyclette a amené comme transformations…
TESSIE REYNOLDS Cycliste aguerrie, Royaume-Uni, fin du XIXe siècle (≈1877-≈1950)
Originaire de la ville de Brighton au Royaume-Uni, Tessie Reynolds aurait apparemment été initiée à la bicyclette par son père, qui était propriétaire d’une boutique de vélos.1
En 1893, à l’âge de 16 ans, la courageuse Tessie Reynolds parcourt le trajet aller-retour entre les villes de Londres et de Brighton en Angleterre. Elle effectue ce parcours de 176 km en 8,5 heures. Elle fera scandale parce qu’elle portait le « rational dress », un habillement fait de trousers, d’élégants pantalons bouffants pour femmes arrêtant sous le genou.
En plus de son habillement hors de l’ordinaire, la jeune Tessie Reynolds bravait les tabous en enfourchant une bicyclette d’homme, accompagnée de quelques compagnons masculins. La presse se saisit de l’affaire, faisant de Tessie Reynolds une martyre de la cause des femmes à vélo.
Quelques années auparavant, en 1885, l’invention du vélo « safety », muni d’un pédalier et de deux roues égales, puis du pneumatique aidait à rendre le cyclisme praticable par la majorité des gens. Le vélo se démocratise et les femmes n’en peuvent plus de se le voir interdire. Malgré l’opinion défavorable des prêtres et des médecins, elles enfourchent les vélos et dans les médias, beaucoup d’encre coule à leurs dépens. Un débat fait rage sur le « rational dress », un mouvement pour l’allègement du code vestimentaire féminin.
AMELIA BLOOMER (1818-1894)2ET LIBBY MILLER (1822-1911) Militantes pour les droits des femmes, États-Unis
Amelia Bloomer était une militante pour les droits des femmes. Dès 1849, Amelia Bloomer et une de ses amies suffragette prêchent contre les longues jupes encombrantes, dans le premier bulletin de leur revue The Lily. De 1849 à 1853, Amelia Bloomer fut l’éditrice de la publication The Lily, une revue qui faisait la promotion des droits de femmes et se voulait un porte-étendard du mouvement pour la tempérance.
En 1851, Amelia Bloomer reçoit la visite de Libby Miller à Seneca Falls dans l’état de New York. Libby Miller était aussi une militante pour des droits des femmes aux États-Unis. Pour se rendre à Seneca Falls, Libby Miller arrive à vélo et vêtue de pantalons bouffants qu’elle a elle-même confectionnés. Les femmes à qui elle rend visite sont emballées par cette tenue et l’adoptèrent rapidement.
Pourtant, ces pantalons bouffants deviendront connus sous le nom de bloomer, même si c’est Libby Miller et non Amelia Bloomer qui en est la créatrice. Amelia Bloomer s’intéressait aux réformes du code vestimentaire et réclamait que les femmes puissent porter ces fameux pantalons bouffants. Le nom de Bloomer fut associé à ce type d’habillement, même si elle a toujours refusé d’en prendre le crédit comme il s’agissait d’une création de Libby Miller. Le surnom des pantalons « bloomers » vint du fait qu’Amelia Bloomer écrivait des articles sur les habillements non traditionnels, imprimait des illustrations en faisant la promotion dans The Lily et portait elle-même cette tenue.
Née le 8 novembre 1915 à Longueuil, sur la rive-sud de Montréal, Marguerite Lescop a terminé en 1933 le cours de lettres et sciences à l’école Villa Maria. En 1934, elle suit un cours en ébénisterie à l’École du meuble. En 1942, elle se marie et part avec son nouvel époux faire le tour de la Gaspésie à vélo pour leur lune de miel. Un voyage hors du commun pour l’époque!
Après avoir élevé une famille de sept enfants, Marguerite Lescop s’inscrit aux ateliers d’écriture du Collège Rosemont en 1990 où elle entreprend, à 75 ans, de rédiger son autobiographie. Après avoir soumis en vain son manuscrit à trois éditeurs montréalais, pour célébrer ses 80 ans, elle décide de publier elle-même son livre qui s’avèrera un succès.
La Gaspésie à vélo… en 1942!
Qui ne risque rien n’a rien. C’est ainsi que se font les grandes découvertes. Une fois que nous avons conçu l’idée d’un tour de la Gaspésie à bicyclette comme second voyage de noces, il ne nous reste plus qu’à le réaliser. Rien ne nous arrête, pas même les objections et les protestations qui fusent de toutes parts. Nos parents et nos amis nous trouvent complètement fous. Nous en convenons avec eux : fous, nous le sommes, mais une graine de folie n’a jamais fait de tort à personne… En ce temps-là, faire le tour de la Gaspésie en voiture était déjà toute une aventure, alors imaginez à bicyclette! Et en voyage de noces! C’était comme si nous voulions entreprendre l’ascension de l’Everest. En plus de nous traiter de fous, on nous qualifie aussi de héros, ce qui flatte notre ego et nous encourage davantage à poursuivre notre projet. Les préparatifs de cette expédition vont bon train. La chose la plus importante, c’est évidemment la bicyclette. Mais à cette époque, le choix n’est pas très compliqué. […] Il n’y a que la bonne vieille CCM standard. […] [N]ous n’avions ni casques protecteurs, ni maillots jaunes, ni culottes collantes dites à tort cuissardes, ni gants aux doigts tronqués. Rien de tout cela pour nous donner fière allure comme le cycliste d’aujourd’hui. Nous n’avions que la fougue des amoureux!
Extrait de l’autobiographie de Marguerite Lescop “Le tour de ma vie en 80 ans”, pp.56-57.
DENISE BELZIL4 Directrice de l’école de mécanique cycliste Techno Cycle, Montréal
Son premier vélo, Denise Belzil l’a démonté à l’âge de 10 ans, dans la cour de la résidence familiale, à Montréal. Depuis, la mécanicienne a réparé des milliers de bicyclettes — dont celles des cyclistes de l’équipe féminine canadienne lors du Tour de France de 1989!
Thérapeute en réadaptation de formation, Denise Belzil « a appris son métier de mécano sur le tas » dans des boutiques de sport. Elle a notamment travaillé comme directrice de produits chez le fabricant américain Nevada Cycles & Sports et comme consultante technique au magazine Vélo Mag. Depuis 1994, Denise Belzil dirige l’école de mécanique cycliste Techno Cycle, qu’elle a fondée elle-même, où elle dispense les cours de formation sur place, à Montréal, et aux quatre coins du Québec.
Cycliste été comme hiver, Denise Belzil trouve le temps d’enfourcher son Marinoni, son Ryffrank ou son Guru — « des vélos fabriqués à Lachenaie, Sherbrooke et Laval! » dit-elle fièrement — pour se balader sur les routes du Québec. Elle tient aussiun blogue vélo avec le magazine L’actualité.
CLAIRE MORISSETTE Fondatrice de Cyclo Nord-Sud et militante vélorutionnaire, Montréal 1950-2007
« Mon vélo, mon cheval de bataille, mon fidèle compagnon de combat, le taureau que je prends par les guidons chaque matin». Militante vélorutionnaire, Claire Morissette avait pour son vélo une affection particulière. Celle qui a lutté pendant plus de 30 ans en compagnie de sa bicyclette pour améliorer la qualité de l’environnement dans lequel nous vivons considérait « ces deux roues » comme le moyen de transport de l’avenir!
Elle devient, avec Robert Silverman, un pilier de l’organisme militant le Monde à Bicyclette des années 1970 à 1990. Par la suite, elle co-fonde une entreprise de partage de véhicules à Montréal, Communauto. En 1999, elle crée Cyclo Nord-Sud.
Le visage du Québec s’est transformé grâce à l’action et l’imagination de cette égérie du vélo. Si des pistes cyclables couvrent le territoire québécois, c’est en partie grâce aux revendications de Claire Morissette. Des actions frappantes et cocasses et un lobbying incessant aboutirent à l’accès au métro, au train et à la Rive-Sud de Montréal pour les vélos.
L’écriture de son livre Deux roues, un avenir, paru aux éditions Écosociété et portant sur l’historique de la bicyclette et ses effets libérateurs pour la femme, l’engagea à aller plus loin : récupérer les vélos délaissés ici pour les rediriger vers des populations démunies du Sud comme outil de développement. Son dernier projet, Cyclo Nord-Sud consistait à partager cet outil particulièrement efficace avec les femmes des pays défavorisés.
La fondatrice de Cyclo Nord-Sud est décédée des suites d’un cancer à l’été 2007. Un an plus tard, la Ville de Montréal nommait en son honneur la piste cyclable qui parcourt le centre-ville de Montréal honorant ainsi la mémoire de cette grande militante environnementale.
Marie-Flore Bélizaire est infirmière au centre de santé du village de Caracol, dans la région du Cap-Haïtien en Haïti. Le Centre de santé du village de Caracol est une initiative soutenue parCENTRECH-Enfantaisie, partenaire de Cyclo Nord-Sud en Haïti. En 2008-2009, Marie-Flore a reçu une bicyclette qu’elle utilise depuis.
Marie-Flore explique que son vélo a beaucoup changé sa vie en lui permettant de faire des visites à domicile et d’aller faire de l’animation avec les femmes de diverses associations. Le vélo a également des effets positifs pour la communauté qui bénéficie ainsi des bons soins de l’infirmière Bélizaire.
En plus d’offrir des consultations santé de base à temps plein, Marie-Flore Bélizaire assure aussi la gestion du Centre et coordonne les visites du médecin en résidence les vendredis. Sa bicyclette lui permet notamment de répondre aux appels d’urgences et de se rendre dans des villages plus éloignés pour prodiguer des soins de base.
Le village de Caracol, dans le Nord-Est d’Haïti, porte maintenant le titre de Vélo-Cité. Grâce à l’initiative appuyée par CENTRECH et Cyclo Nord-Sud, des milliers de vélos québécois ont pris la route vers Caracol au cours des dernières années. C’est pourquoi il est aujourd’hui beaucoup plus courant de voir sur les routes de cette région des femmes se rendant au marché avec leur récolte à l’avant d’un triporteur, des jeunes apportant de l’eau aux personnes âgées et qui se rendent à l’école en trois fois moins de temps qu’auparavant…
ALINA MIRANDA BUSUTIEL Mère monoparentale, La Havane, Cuba
Alina Miranda Busutiel, de La Havane, est mère monoparentale de deux adolescentes. En novembre 2001, elle a reçu une bicyclette via un programme de Cyclo Nord-Sud et de Sociedad cubana de producción de animales.
À partir de ce moment, cela lui a donné les moyens d’aller facilement de la maison au travail et vice et versa. Si on ajoute la distance et l’inclinaison de la route, le chemin était assez difficile déjà pour se rendre à l’arrêt d’autobus le plus près, où l’attente était très longue. Grâce à son véhicule, elle visite la partie de sa famille habitant dans le quartier Los Cuatro Caminos du centre de La Havane, située à une distance de 4,5 km. Elle peut dorénavant les rencontrer plus fréquemment.
Son nouveau moyen de transport lui a permis de s’occuper de ses affaires de façon efficace et rapide. Voici, dit-elle, les avantages que lui apporte la bicyclette : « Je n’ai pas à attendre longuement l’autobus ; j’ai pu augmenter le nombre de mes déplacements locaux ; cela me permet de m’occuper des travaux ménagers quotidiens, mais plus facilement ; mes enfants utilisent quotidiennement la bicyclette ; ma santé s’est améliorée avec cet exercice quotidien, et cela m’a transformé d’une sédentaire en cycliste ; j’ai amélioré mes économies en n’ayant plus à payer pour les transports en commun ; j’économise mon temps entre le travail et le foyer ».
Depuis 1992, le gouvernement cubain tente d’introduire la « culture du vélo » sur l’île. À la fin de la guerre froide, en réponse à la chute spectaculaire de l’approvisionnement en pétrole suite à la disparition de l’URSS, Cuba a d’abord commandé 1,2 million de vélos à la Chine. Au début des années 1990, ces vélos furent vendus aux travailleur(e)s et aux élèves vivant à une distance de deux à 12 kilomètres de leur lieu de travail. Sans la moindre tradition cycliste, Cuba a ainsi jeté les bases de sa vélorution.6En 1991, La Havane, une ville de plus de 2 millions d’habitant(e)s ne comptait que 30 000 vélos. Quelques années plus tard, le ratio des vélos par rapport aux autos, autobus et camions a atteint près de 20 pour 1.
ASMAA AL-GHOUL7 Blogueuse, journaliste et militante pour les droits des f emmes, Gaza, 1982-
Asmaa Al Ghoul – blogueuse, journaliste et activiste féministe palestinienne – vit à Gaza au Moyen-Orient. Elle est connue pour ses dénonciations des crimes d’honneur et de la violence faite aux femmes. En septembre 2010, accompagnée de trois amis, deux Italiens et une Étatsunienne, Asmaa Al Ghoul est partie de Rafah, à la frontière égyptienne, pour se diriger vers Gaza, 30 kilomètres plus au nord à bicyclette. C’était un périple lourd de sens pour Asmaa à qui la bicyclette est interdite depuis l’enfance pour seule raison qu’elle est une femme.
La société palestinienne en général, et celle de Gaza en particulier, réprouve l’utilisation du vélo par les filles. « Mes amis étrangers y voient un simple moyen de transport agréable, explique-t-elle, mais, pour moi, cela signifie beaucoup plus. À Gaza, on ne croise à peu près jamais une femme à vélo. Aucune loi ne l’interdit expressément, mais les gens ne voient pas ça d’un bon œil. En plus, le Hamas a promulgué une série de règles discriminatoires à l’égard des femmes. C’est injuste et stupide. Ce voyage était une sorte de défi. Je voulais voir comment les gens allaient réagir. »
Accueilli surtout par des encouragements, le quatuor a été confronté à deux incidents malheureux. Des jeunes à moto se sont mis à les poursuivre en prétendant qu’ils étaient de la police du Hamas. Finalement, quand une voiture de police est passée, Asmaa leur a demandé de chasser les motards, ce que les policiers ont fait. Le deuxième accident a cependant obligé le petit groupe à s’arrêter. Un autre groupe de jeunes à moto les ont coincés en frappant dans le dos l’autre femme accompagnant Asmaa et en crachant au visage de cette dernière. Asmaa et ses trois comparses ont réussi à terminer leur randonnée malgré quelques problèmes mécaniques.
Depuis que le Hamas détient le pouvoir dans la bande de Gaza, il a imposé une série de limitation des libertés publiques qui pénalisent surtout les femmes. « Gaza aujourd’hui a bien changé, et nous sommes devenus étrangers dans notre propre ville. Je me demande tous les matins quand je pourrai vivre dans ma ville comme je le souhaite et non comme on me l’impose. »
Hountondji Aimée (1996- ) Élève de quinze ans, commune d’Abomey, Bénin8
Hountondji Aimée est une élève d’une quinzaine d’années. Elle vit dans la commune d’Abomey, à 130 kilomètres de la capitale Cotonou. Ses parents et sa famille sont plutôt démunis.
Son collège est situé à plus de 15 kilomètres de chez elle. Comme dans plusieurs régions défavorisées au Bénin, aucun transport scolaire organisé n’existe dans sa région. Depuis plusieurs années, elle doit donc parcourir ce trajet à pied deux fois par jour, sauf le dimanche où elle a congé.
Malgré ces conditions difficiles, elle a pu obtenir son Brevet d’études du premier cycle (l’équivalent d’avoir complété 10 années d’études ou le secondaire 4) ce qui lui a permis d’accéder au collège. Hountondji Aimée est parmi les meilleures élèves admis au collège.
En guise de récompense, elle s’est vue remettre des fournitures scolaires par la direction de son nouveau collège. C’est l’Association de Jeunes Déterminés et Unis pour un Idéal (AJeDUI), une organisation non-gouvernementale (ONG) béninoise partenaire de Cyclo Nord-Sud, qui a offert à la jeune Hountondji Aimée un vélo tout terrain (VTT) 24 pouces.
Cette donation fait partie du programme de lutte contre la pauvreté d’AJeDUI. Maintenant qu’Hountondji Aimée possède un vélo, elle peut se rendre plus rapidement au collège et revenir plus vite chez elle après les cours. Cette bicyclette est donc une manière de l’encourager et de l’aider à poursuivre ses études.
Rouler à bicyclette permet de couvrir des distances plus importantes en beaucoup moins de temps et donc, de se rendre dans des villes ou des villages encore inexplorés. Qui dit nouveaux endroits, dit aussi nouvelles rencontres avec d’autres femmes ou d’autres hommes, loin des regards traditionnels du chaperon ou d’un parent masculin. Pour bien des maris, des pères ou des frères, cela voulait dire qu’ils perdaient ainsi un certain contrôle sur les femmes de leur famille.
2) Un code vestimentaire contraignant
Vers le milieu du XIXe siècle, au moment où le vélo fait son apparition parmi la bourgeoisie européenne et nord-américaine, la mode vestimentaire châtie le corps de la femme occidentale. L’élégance exige une taille de guêpe, de longs corsets étouffant la respiration et la circulation, des jupes et des jupons longs empêtrant les jambes et de lourds chapeaux exigeant des prouesses d’équilibre.
Les jupes raccourcissent progressivement, « rapportant dans leurs plis moins de crottin et de crachats à la maison », plaident les progressistes. Et si on regarde dessous, on s’aperçoit que les innombrables jupons sont restés dans la penderie, pour être remplacés par des knickers (une culotte) ou bien par le bloomer (un pantalon bouffant).
3) Pédaler… malgré l’opinion publique
En Angleterre victorienne, les femmes rongent leur frein. Avec la popularité des excursions en grand-bi (ancêtre de la bicyclette), les épouses ou les sœurs des « bicyclistes » sentent bien qu’elles manquent quelque chose lorsque les hommes reviennent à la maison le dimanche soir, racontant une fin de semaine palpitante, remplie d’aventures et de découvertes. L’opinion publique maintient que « pédaler n’est pas féminin ». On craint que ce soit dommageable pour les femmes, tant pour leur santé que leur moral et leur réputation. Prêtres et médecins y vont aussi de leur avis d’expert en soutenant que la bicyclette n’est pas appropriée pour la gent féminine.
Encore aujourd’hui, certains groupes conservateurs politiques ou religieux en Inde, en Corée du Nord, en Iran, en Arabie saoudite ou en Afghanistan ont tenté d’interdire à des femmes de rouler à vélo sous prétexte que des vêtements permettant de faire cet exercice pouvaient être indécents ou parce que la pratique du vélo donnerait aux femmes trop de liberté physique.1Tout comme en Occident au début du XXe siècle, des barrières sociologiques doivent encore être surmontées : certaines cultures considèrent même qu’« une femme à vélo est trop libérée pour être une bonne épouse ».
Dans les pays en voie de développement, une division traditionnelle du travail assigne habituellement aux femmes le transport quotidien de l’eau, du bois de cuisson et des denrées agricoles pour les besoins de la famille. En Afrique, la majorité des tâches de transport incombent aux femmes, mais ce sont les hommes qui sont propriétaires de la plupart des moyens de transport et qui les utilisent.3En Tanzanie, par exemple, les femmes assument quelque 79 % du temps consacré au transport et 90 % du volume transporté pour chaque famille. Elles y consacrent presque cinq heures par jour, en trois ou quatre déplacements. Les filles y passent trois fois plus de temps que les garçons et abandonnent très tôt l’école pour s’acquitter de ces corvées. Ces trajets se font à pied, avec la charge sur la tête, le dos ou les épaules, et il n’est pas rare qu’elles portent en plus un enfant en bas âge.
Le vélo est le véhicule idéal pour des trajets fréquents, sur de courtes distances, avec des charges petites ou moyennes, hors des routes carrossables. Il permet de se déplacer environ trois fois plus vite qu’à pied et de transporter des charges beaucoup plus lourdes, réduisant le nombre d’aller-retour.
5) Quand le vélo devient synonyme d’autonomie
Autonomie financière Il y a une forte corrélation entre la pauvreté et la mobilité urbaine. La pauvreté complique la mobilité et le manque de transport aggrave la pauvreté. En outre, le cout des transports pèse sur les ménages qui ont déjà des difficultés financières.4Une émancipation financière est aussi nécessaire pour que les femmes puissent procéder à l’achat d’un vélo. Néanmoins, les revenus découlant de l’acquisition d’une bicyclette sont bien tangibles : à Beira au Mozambique, un projet de la Banque mondiale a observé une augmentation du revenu des femmes de 4 %, mois après mois, grâce à la possession d’un vélo.
Quant aux femmes des pays développés, étant moins rémunérées que les hommes, elles sont moins « automobilisées » qu’eux et moins favorisées dans les transports, quoique cet écart ait tendance à diminuer. D’emblée, la bicyclette est l’amie de la femme, lui offrant une mobilité économiquement accessible. Très souvent, c’est sa capacité de mobilité qui déterminera si une femme peut travailler ou non, et, par conséquent, modifiera son revenu. Le vélo procure une grande liberté d’action sur les trajets complexes créés par les distances que l’aménagement pro-automobile introduit entre la maison, le travail, la garderie, les magasins et services, et les lieux de loisirs familiaux.
Gagner du temps Le vélo est particulièrement adapté pour les femmes, car elles effectuent généralement des trajets courts et en dehors des heures de pointe, jonglant entre leur travail, les enfants et leurs autres responsabilités. De plus, la bicyclette les rend indépendantes des horaires des transports publics et offre davantage de flexibilité dans la gestion de leur temps. Sur des distances de 5 à 20 kilomètres, la bicyclette est beaucoup plus rapide et plus économique que la voiture5.
Éducation En Europe, à la fin du XIXe siècle, la femme à vélo était devenue un symbole de liberté. À un point tel qu’en 1897, les étudiants de l’université Cambridge en Angleterre qui protestaient contre l’admission des femmes au baccalauréat ont pendu devant la Maison du Sénat une effigie de femme en rational dress et à bicyclette!6
Dans les pays en voie de développement, l’accès à un vélo pour les filles et les femmes leur fait gagner du temps parce qu’elles pourront effectuer leurs tâches plus rapidement. Quelques heures par jour qui leur permettront de se rendre à l’école, encore une fois plus rapidement si elles peuvent faire le trajet à bicyclette. À l’inverse, le vélo permet aussi à des enseignant(e)s de se rendre dans des endroits difficiles d’accès. Et voilà un autre engrenage de changement… Les femmes éduquées jouissent souvent d’un grand respect auprès de leurs consœurs, elles peuvent contribuer à briser les tabous et à faire accepter l’usage de la bicyclette par les femmes, en devenant elles-mêmes des modèles.
6) La santé et la sécurité
En permettant de se déplacer environ trois fois plus vite qu’à pied et de transporter des charges beaucoup plus lourdes, le vélo permet aux femmes qui doivent transporter des charges de réduire le nombre d’aller-retour à effectuer. Lorsque transformé en triporteur, le vélo peut aussi transporter une charge encore plus importante. C’est d’autant plus pratique pour les femmes et les filles qui ont l’habitude de transporter aliments, lavage ou autres charges sur leur tête. Elles évitent ainsi de développer des problèmes de dos et de cou.
Le vélo est aussi un véhicule utile pour faire ses courses, et il permet d’intégrer l’exercice physique aux déplacements, une bonne nouvelle quand on a un horaire serré. Le vélo aide aussi les femmes à s’approprier la nuit, leur permettant de se déplacer rapidement et de façon plus sécuritaire.
7) Mécanique 101
Une fois que le vélo est acheté, il ne reste qu’à l’entretenir et en prendre soin. Il ne nécessitera pas de frais considérables comme c’est le cas pour la voiture. Le vélo est un véhicule bien adapté à l’économie des pays en voie de développement puisqu’il fonctionne sans pétrole, lequel est très dispendieux s’il doit être payé en devises étrangères. Cela fait donc du vélo un moyen de transport plus accessible aux femmes à faible revenu. Un des derniers tabous qu’il restera à défaire est la capacité des femmes à se familiariser avec la mécanique vélo.
La Québécoise Denise Belzil est une pionnière dans le domaine, ayant elle-même ouvert son école de mécanique Techno Cycle.
L’atelier de réparation de vélo communautaire SantroVélo, à Montréal, organise quant à lui des journées de mécanique réservées aux femmes et aux transgenres, afin que ces personnes sentent à l’aise dans un espace traditionnellement masculin.7
8) Quand les femmes se regroupent autour du vélo
Le vélo ne sert pas aux femmes qu’à travailler et augmenter leur liberté quotidienne. Le cyclisme au féminin se conjugue aussi avec discipline sportive! De plus en plus de femmes dépassent leurs limites sur deux roues lors de compétitions internationales. Au Québec, le réseau des Cyclopétards est né en 2007 d’une volonté de femmes cyclistes de se regrouper pour apprendre à rouler en peloton et organiser des sorites entre elles.8
Toujours au Québec, les Dérailleuses, collectif cyclo-féministe, s’est donné comme mission de contrer le sexisme dans le monde du vélo par le moyen de conférences, publications, ateliers et balades à vélo.9
En Afghanistan, les Petites reines de Kaboul sont des militantes qui roulent pour la libération de la femme depuis 2003, dans ce pays où le droit au vélo n’est toujours pas acquis. Leur courage et leurs actions leur a valu une candidature au prix Nobel de la paix en 2016.10
Une discussion plus détaillée sur l’emploi des termes « Nord » et « Sud » se retrouve au module La solidarité internationale de cette trousse.
Paul Starkey, Les solutions au transport local : acteurs, paradoxes et progrès, Document de travail SSATP No. 56F, Banque mondiale, Programme de politiques de transport en Afrique subsaharienne, p.4.
Laissez-moi vous dire ce que je pense de la bicyclette. Elle a fait plus pour l’émancipation de la femme que n’importe quelle chose au monde. Je persiste et je me réjouis chaque fois que je vois une femme à vélo. Cela procure un sentiment de liberté et d’autonomie à une femme.
– Susan B. Anthony, États-Unis, 1896
La libération des femmes par le vélo
Deux roues, un guidon et voilà que de nouveaux horizons s’ouvrent à celles qui pendant bien longtemps se trouvaient confinées au foyer. Qui aurait pensé que la bicyclette allait devenir l’engrenage d’un changement incontournable pour des millions de femmes à travers le monde?
L’histoire nous révèle que la bicyclette a été et demeure un important outil de libération pour les femmes. Le droit de pédaler a dû être gagné de haute lutte par les femmes et n’est d’ailleurs pas encore acquis partout dans le monde. Dans les pays en voie de développement, on constate aussi que la bicyclette joue un rôle clé dans l’amélioration de la qualité de vie des femmes qui décident de braver les normes sociales pour enfourcher le vélo.
Autres temps, autres continents, autres mœurs
Les femmes se libèrent : que ce soit à la fin du XIXe siècle ou à des périodes plus récentes, avec le vélo, elles acquièrent une liberté et une autonomie sur deux roues. Elles parviennent à sortir de leur domicile, bravent les commentaires sexistes adressés aux femmes cyclistes, changent leurs habitudes vestimentaires et se gardent en santé tout en découvrant les bases de la mécanique.
Dans certains cas, le vélo est une question de participation citoyenne. Prenons l’exemple d’un villageois qui tire avantage de son vélo pour se rendre à une rencontre politique à laquelle il n’aurait pu participer s’il avait dû parcourir les 20 kilomètres à pied. Favorisant une plus grande mobilité, la bicyclette devient donc aussi un moyen de rester en contact, en faisant passer les nouvelles d’un village à l’autre, en permettant de recevoir des journaux ou d’autres publications, etc. Qu’on songe aux différentes compagnies de livraison qui utilisent les messagers à vélo en milieu urbain, nul doute qu’encore une fois, le vélo comme moyen de communication est bénéfique.
Pédaler en toute solidarité
La bicyclette est en soi un petit prodige : d’une mécanique extrêmement simple, pouvant transporter jusqu’à dix fois son propre poids, sans besoin de carburant et sans pollution, la bicyclette est la « petite reine » de l’ingénierie. Mais cela ne s’arrête pas là… Avec sa simplicité désarmante, la bicyclette nous permettrait d’aller au bout du monde si on le voulait… En fait, c’est littéralement ce que font certaines personnes commePierre Bouchard et Janick Lemieux, deux comparses de Cyclo Nord-Sud qui, depuis une quinzaine d’années, pratiquent une certaine forme de nomadisme et pédalent à travers le monde. Deux autres aventuriers à vélo, Lucie Poulin et Torrey Pass dePedaling Southont, quant à eux, pédalé de l’Alaska à l’Argentine! Au fil de leurs périples, ces bourlingueur(euse)s sur deux roues ont pu rencontrer plusieurs des organisations partenaires de Cyclo Nord-Sud et voir de leurs propres yeux les bienfaits du vélo dans la vie de milliers de gens.
L’accès à l’éducation et la possibilité d’améliorer ses performances scolaires
Dans certaines régions du monde, où l’on ne trouve pas de transport en commun ou de transport scolaire, l’accès à un vélo est décisif pour se rendre à l’école.
À l’inverse, le vélo permet aussi à des enseignant(e)s de se rendre dans des endroits plus difficiles d’accès. Voilà un autre engrenage du changement…Dans les pays en voie de développement, l’accès à un vélo pour les filles et les femmes leur fait gagner du temps en leur permettant d’effectuer leurs tâches plus rapidement et de se rendre à l’école. Une étude menée en Espagne en 2010 a démontré que les adolescentes qui se déplacent à pied ou à vélo pour aller à l’école obtiennent de meilleures notes. L’étude a été menée auprès de 1 700 élèves de 13 à 18 ans dans cinq villes espagnoles. Parmi les filles, on a constaté de meilleures performances pour celles qui se déplaçaient à pied ou à vélo pour aller à l’école, avec des résultats supérieurs pour celles dont le trajet durait au moins 15 minutes. Un argument de plus pour des programmes commeMon école à pied, à véloorganisé par Vélo Québec et qui fait la promotion des transports actifs dans la vie des jeunes.
L’autonomie que le vélo apporte aux filles et aux femmes est importante. Que ce soit à la fin du XIXe siècle ou à des périodes plus récentes, avec le vélo, des filles et des femmes à travers le monde ont pu acquérir une liberté et une autonomie sur deux roues. Grâce au vélo, elles ont pu sortir de leur isolement, changer leurs habitudes vestimentaires et prendre soin de leur santé tout en découvrant les bases de la mécanique.
Cycloféminisme… la pédale douce
Dans les années 1850, aux États-Unis, on voit apparaitre un pantalon bouffant porté par des femmes adeptes du vélo, dont les militantes Amelia Bloomer et Libby Miller. En 2001, la Cubaine Alina Miranda Busutiel reçoit une bicyclette par l’entremise d’un programme de Cyclo Nord-Sud. Son vélo lui a permis d’économiser en n’ayant plus à payer pour prendre les transports en commun. À l’été 2010, une militante palestinienne pour les droits des femmes, Asmaa Al Ghoul, décide de traverser à vélo une partie de Gaza pour défier les croyances populaires voulant que la place d’une femme n’est pas sur une bicyclette. En Afghanistan, les «Petites reines de Kaboul» se battent pour que les femmes puissent s’épanouir dans le sport de leur choix. La bataille est loin d’être gagnée, mais elles font beaucoup jaser et étaient même candidates pour le prix Nobel de la paix en 2016.
Non seulement certains utilisent leur vélo pour se rendre au travail et ainsi épargner de l’argent en n’ayant pas à payer pour des frais de transport en commun ou pour un véhicule motorisé, mais d’autres font carrément de leur vélo leur source de travail.
Dans bien des pays où l’économie informelle est au cœur des activités quotidiennes génératrices de revenus, les travailleur(euse)s doivent faire preuve de créativité et de débrouillardise. Ainsi voit-on se déplacer des vendeur(se)s ambulants qui, plutôt que d’attendre que des gens viennent à leur commerce, décident de se rendre jusqu’à leurs client(e)s. Des femmes ayant fixé leur machine à coudre à l’arrière de leur vélo peuvent ainsi se déplacer aisément pour offrir leur service à ceux qui en ont besoin.
Le vélo permet aussi de livrer plus rapidement le poisson et de développer d’autres projets générateurs de revenus comme la location de bicyclettes pour le cyclotourisme. Et que dire de ces gens du Ghana qui fabriquent des vélos à partir de matériaux générés localement, comme le bambou. Une méthode qu’on voit également employée dans la vidéoUn regalo que mueve. Même lorsqu’ils ne sont plus fonctionnels pour rouler, les vélos et leurs pièces peuvent encore servir à fabriquer différents instruments fort utiles dans le contexte des pays du Sud : pompes à eau, machines à laver, instruments aratoires, décortiqueuses, déchiqueteuses, dénoyauteuses, barattes, treuils, génératrices, ventilateurs, moteurs à hélices, moulins à aiguiser, à coudre, à scier, à tourner le bois, à vriller, etc. Tous des instruments à pédales qui offrent des performances fort intéressantes.
Maya Pedalest une organisation guatémaltèque qui utilise les dons de vélos pour créer toutes sortes de « bici-machines » qu’on appelle bicimáquina en espagnol. Ces machines servent à toutes sortes de choses comme des cordes à linge, pompes à eau, moulins à grains, etc.
Le vélo comme source de revenus ou moyen de transport pour le travail n’est pas seulement une possibilité pour les populations du Sud. Lavétérinaire à véloClaude Lefrançois se distingue aussi en faisant ses visites à domicile sur la Rive-Sud de Montréal en se déplaçant à bicyclette, et ce été comme hiver! Quant au Fruixi1, il permet de livrer des fruits et légumes frais dans le quartier Rosemont à Montréal!