Fiche 2

Module 3

La solidarité internationale

Quels-sont les liens de solidarité entre les communautés? Comprenez-les avec ce module tout en vous informant sur l’origine de ces concepts.

Dans ce module

Prêt pour le quizz?

Fiche2/3 » Nord-Sud, pays pauvres et pays riches : Comment se retrouver dans tout ça?

Nord-Sud, pays pauvres et pays riches : Comment se retrouver dans tout ça?

 

Les quelques questions précédentes mettent en lumière les disparités, écarts et inégalités qui existent entre différents pays. Cependant, il ne faudrait pas non plus oublier que de tels écarts et inégalités se retrouvent aussi dans la population d’un même pays.

Les appellations pour désigner des régions du monde où l’appauvrissement et les populations défavorisées sont présents en plus forte concentration ont variées au fil du temps. Un bref survol de quelques expressions permettra d’avoir une compréhension plus critique et éclairée de ces termes.

Pays sous-développés : En janvier 1949, le président des États-Unis, Harry Truman, annonçait dans son discours inaugural l’existence d’une nouvelle catégorie de pays : « les pays sous-développés. » Un qualificatif qui n’existait pas auparavant. S’ouvrait ainsi l’ère de l’aide publique au développement.2 Cette notion se base essentiellement sur une notion de développement inspirée d’une compréhension capitaliste et occidentale. Une perspective économique qui fait en sorte que les pays, dont plusieurs sont d’anciennes colonies, survivent grâce à l’agriculture et aux matières premières, et ont un faible taux d’industrialisation. Ce terme négatif insinue également que le pays gagnerait à se développer.

Pays (sur)développés : Si on dit de certains pays qu’ils sont en voie de développement, on suggère donc qu’il y a aussi son contraire, c’est-à-dire des pays développés, voire surdéveloppés. Encore une fois, une telle notion met l’accent sur un développement économique, plutôt que de tenir compte d’autres aspects tels que la vie communautaire et les conséquences environnementales qu’entrainent les façons de vivre des pays dits plus développés. Voir : Consommation boulimique au Nord, assiette à moitié vide au Sud.

Pays en développement : Dans les années 1960, jugeant que l’appellation « pays sous-développé » était péjorative, un nom plus poli « pays en voie de développement » ou « pays en développement » voit le jour. Dans les années 1970, ce sera au tour de l’expression « Pays les moins avancés » de faire son apparition. Pourtant, les réalités demeurent les mêmes et les inégalités mondiales ne cessent de s’accroitre non seulement pour les pays du Sud, mais aussi à l’intérieur de chaque pays. Les pauvres continuant de s’appauvrir et les riches, de s’enrichir.

Bonheur intérieur brut : Ce terme vient en réaction à l’indice économique utilisé pour classer les pays dans le monde, le Produit intérieur brute (PIB). Le roi du Bhoutan fut le premier à le préconiser pour mesurer autre chose que la croissance économique dans son pays aux valeurs bouddhistes.3

Tiers-monde : une expression inventée par le démographe français Alfred Sauvy dans un article intitulé Trois mondes, une planète, publié en 1952. À cette époque, en plein début de la guerre froide, le monde semble divisé en deux, le bloc de l’Ouest avec à sa tête les États-Unis et le bloc communiste, mené par l’URSS. À ce sujet, Sauvy écrit :

« Nous parlons volontiers des deux mondes en présence, de leur guerre possible, de leur coexistence, etc., oubliant trop souvent qu’il en existe un troisième, le plus important et, en somme, le premier dans la chronologie. C’est l’ensemble de ceux que l’on appelle, en style Nations unies, les pays sous-développés. […] Et peut-être, à sa vive lueur, le monde numéro 1, pourrait-il, même en dehors de toute solidarité humaine, ne pas rester insensible à une poussée lente et irrésistible, humble et féroce, vers la vie. Car enfin ce Tiers monde ignoré, exploité, méprisé comme le Tiers État, veut, lui aussi être quelque chose. »

En créant le mot, « Tiers-monde », Alfred Sauvy fait une comparaison entre la situation des pays sous-développés et la condition des exclus politiques du Tiers état, au temps de la monarchie en France, avant la Révolution française de 1789.

Nord-Sud : La désignation d’une limite entre le Nord et le Sud est le nom donné à une ligne imaginaire qui regrouperait les pays du Nord étant généralement considérés comme plus industrialisés et économiquement plus riches; alors que les pays appartenant au Sud, sont généralement considérés comme moins développés économiquement et plus appauvris. Succédant à d’autres termes, tels que « tiers-monde » ou « pays en développement », la désignation Nord-Sud est apparue en 1980 dans un rapport intitulé Nord-Sud : un programme de survie, rapport de la Commission indépendante sur les problèmes de développement international présidée par l’ancien chancelier allemand Willy Brandt. Ce rapport utilisa aussi des cartes géographiques où se retrouvait la projection de Peters.

Depuis l’introduction de ce terme en 1980, la réalité a changé. Certains pays du Sud comme le Chili, Cuba et les Émirats arabes unis ont maintenant atteint un indice de développement humain (IDH) supérieur à celui de la Roumanie ou de l’Ukraine. Inversement, cinq des principaux pays dits émergents se retrouvent du côté Sud : la Chine, le Brésil, l’Inde, l’Afrique du Sud et le Mexique. C’est pourquoi les appellations « pays du Sud » et « pays du Nord » sont moins utilisées aujourd’hui.

Le Sud globalisé : Avec l’effondrement de l’Union soviétique au début des années 1990, on voit maintenant apparaitre l’expression Sud globalisé qui met ainsi l’accent sur le fait qu’il n’y a pas seulement « un Sud », mais bien plusieurs réalités à travers le monde où se retrouvent des populations, des économies nationales qui sont marginalisées et exploitées. En fait, on retrouve « des Sud » même dans les pays plus favorisés. « [L]’évolution des villes dans de nombreuses régions du monde est contraire aux impératifs écologiques, sociaux et économiques. Plusieurs facteurs économiques, institutionnels et juridiques contribuent par exemple à accentuer la fragmentation des villes. On constate une ligne de fracture entre la ville « légale », bien équipée, moderne et productive, et le reste de la ville, illégale ou « informelle », parfois désignée comme bidonville, shanty town ou favela.4 » Depuis la fin des années 1990, la montée de l’altermondialisme a également contribué à la diffusion de ce terme.

  1. Source image : Daniel Raiche.
  2. Jacques B. Gélinas, Dictionnaire critique de la mondialisation : Les mots du pouvoir, le pouvoir des mots, Écosociété, 2008, pp. 250-251.
  3. Bonheur National Brut.
  4. Pierre Jacquet, Rajendra K. Pachauri et Laurence Tubiana sous la dir., L’Annuel du développement durable 2010 – Regards sur la terre : Villes changer de trajectoire, Presses de Science Po, 2010, p.13.